Michel Warren

Michel Warren, membre de notre Conseil d’administration, est décédé brutalement cet été. Bernard Charlot, avec une amitié émue, a bien voulu nous rappeler ce qu’il fut.

Michel Warren est mort.

J’ai beaucoup hésité avant de rédiger ces quelques lignes, car Michel était un ami, mon meilleur ami français encore vivant et il n’y a pas de mots pour dire la souffrance de la mort d’un ami. Peut-être est-ce pour cela que ce type de « notice » et « d’hommage » est généralement écrit dans un style très formel, voire pompeux: pour protéger celui qui l’écrit.

Michel est mort de façon soudaine et injuste. Soudaine, en quelques heures, sans avis préalable, comme s’il avait décidé de mourir avec le même esprit de décision et d’exécution rapide dans lequel il vivait. Et injuste. D’une certaine façon, toute mort est injuste, car il n’y a pas de justification au fait de vivre et donc, encore moins, au fait de mourir. Mais il y a des morts ressenties comme plus injustes que d’autres par ceux qui restent et la mort de Michel est un événement particulièrement injuste: 57 ans, sportif, ne fumait pas, ne buvait pas, consacrait beaucoup de son  temps aux autres. Michel a donné beaucoup de lui-même au cours de sa vie: comme professeur, animateur sportif, ATER à Nancy et à Paris X, chargé de mission au Rectorat de Versailles, membre des CA de l’AECSE et de l’AFIRSE, mais aussi comme père, comme mari et comme ami. Avec les principes de justice, de vérité et de parole dans lesquels il croyait et qui provoquaient, selon les personnes (et parfois chez les mêmes) étonnement, admiration, irritation, amitié et affection. Michel non seulement ne supportait pas la médiocrité, le mensonge et la magouille, mais, en outre,  il le disait, quoi qu’il pût en coûter.

Professionnellement, Michel fut professeur d’Éducation Manuelle et Technique, reconverti en Professeur de Techologie en  collège. Il aimait être Professeur, mais n’aimait pas cette matière (son goût était d’expliquer et non de fabriquer des objets). Il a soutenu, sous ma  direction, une Thèse de doctorat sur la scolarisation précoce à l’école maternelle, avec un intérêt particulier pour les écoles de zones populaires et il a publié livres, chapitres et articles sur ce sujet. Il a été ATER à Nancy et Paris X, et avait la passion de former à la  recherche les jeunes étudiants. Son rêve, que la communauté des Sciences de l’éducation n’a pas rendu possible (pour des raisons que j’ignore et qu’il ne m’appartient pas de juger) était de devenir Maître de Conférences en Sciences de l’éducation. Durant la dernière année de sa vie, Michel fut Chargé de mission (d’études et d’évaluation de politiques publiques) au Rectorat de l’Académie de Versailles, avec une telle efficacité que sa mission venait d’être confirmée quand  il est mort, à partir de ses seuls mérites et malgré les changements politiques et administratifs. Michel était très compétent. Avec ce type de compétence professionnelle et de qualités humaines qui provoquent beaucoup de sollicitations mais rendent difficile une carrière linéaire. Il reste et restera vivant encore beaucoup de temps non seulement dans la mémoire de sa famille et de ses amis, mais aussi dans celle de beaucoup d’étudiants.

Bernard Charlot

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